Je t'aime, mon enfant... je t'aime...

Je t'aime, mon enfant... je t'aime...

Le cadeau
Le ventre de mon épouse s’arrondit, il paraît qu’il y a une surprise à l’intérieur….
moi qui pensaitsque le cadeau, c’était juste ma femme…
mais voilà qu’en plus, celle-ci est devenu l’emballage d’un autre encore plus mystérieux…

Souvent, de toute ma douceur, je parle au petit être de l’autre côté du ventre :
- voilà, c’est papa… je suis là…

Les pétards !
La nuit explose au-dessus de nous, et ainsi revêtue de mille feux d’artifice éclatants, j’ai l’impression de faire un rêve éveillé…. heu…c’est la fête nationale quoi.
Avec mon épouse, nous sommes super bien placés, car nous sommes près l’un de l’autre,
et en plus, (ce qui ne gâche rien) nous avons droit à un double spectacle :
celui du lac de Neuchâtel répétant à la perfection telle une seconde voix tout ce que lui chante le ciel.
Au milieu de tout ce brouhaha festif, tout à coup, j’aperçois sur le visage d’Éliane, mon épouse un pli d’inquiétude qui aussitôt se reflète sur le mien.
- Alain, il faut qu’on parte immédiatement ! le bébé… il tremble de peur !

En effet, même à travers sa paroi de maman, je peux sentir mon petit enfant sursauter à chaque explosion et frémir de tous ses membres…
Naturellement, je m’approche de lui.
- voilà, c’est papa, je suis là, n’aie pas peur….

Aussi incroyable que cela puisse paraître le petit fœtus c’est instantanément calmé,
l’enfant a reconnu la voix rassurante de son papa.

Papa, où t’es ?
C’est grâce à un rêve de ma femme que avons connu son nom : Séphora.
(ça tombe bien, on ne le connaissait pas !)
Pour cette petite, même totalement investi près d’elle, je suis un papa momentanément invisible.
Quelque part, ça ressemble à Dieu et nous….
- Quelle chance elle a, ta maman, de pouvoir te porter, j’aimerais pouvoir être à côté de toi en ce moment ; je me réjouis tellement de te voir…
je t’attends.

La rencontre
Le jour de la naissance, j’ai autant le trac que ma femme (à se demander qui accouche ! ?)
C’était horrible, il y avait du sang, d’étranges bruits électroniques, des gémissements partout ! Éliane, avait très mal (ha la la les filles…! Moi, je n’ai rien senti !).

Puis tout à coup, j’ai vu la tête du bébé sortir ! (*ç%&/()? mais !? il y avait vraiment quelqu’un à l’intérieur !!!)

Aussitôt, on l’a met dans mes bras ! j’ai peur de moi, si souvent maladroit…. je crois défaillir, jusqu’à ce jour, jamais, je n’ai porté quelque chose d’aussi précieux !
Ma fille ne pèse rien, mais mes oreilles me confirme qu’elle est bien réelle.
Séphora les yeux fermés est épouvantée et elle pleure de tous ses poumons !
alors je lui parle :
- voilà, c’est papa, je suis là…

Et là, j’ai vécu un des moments les plus magiques qui soient : Séphora a reconnu ma voix,
elle a cessé de pleurer et, dans le silence, a ouvert ces grands yeux d’un bleu profond*…*aujourd’hui aussi bruns que les miens (? !)
je suis la première personne de sa vie qu’elle voit…
Nous nous sommes longuement regardés, il y a tellement d’amour entre nous…
Elle ne pleure plus, mais moi oui.

Le coup de fil et le placard
Mais, oh misère, elle a un étrange cordon qui lui sort du nombril la reliant à sa maman (si jeune et déjà accro au fil)
Le couper ? ! non, non, j’ai trop peur de lui faire mal, (c’est peut-être mieux de le lui laisser non ?).

Les médecins inquiets pour mon épouse, m’ont demandé de quitter la salle et dans leur précipitation m’ont poussé dans la première porte disponible. C’est ainsi, que je me suis retrouvé dans un placard à balais ! Mais peu m’importe l’endroit, nous sommes enfin ensemble, ma fille et moi. Je prie alors le Seigneur, le remerciant de ce merveilleux cadeau et Le suppliant de m’aider à en avoir soin…
Ça a été aussi fort pour chacun de mes 4 enfants.

L’appel
Séphora a 21 ans.
Je sors d’une répète du groupe de rock et je ne découvre sur Whatsap tous les messages de Séphora que maintenant :
- J’arrive à La Chaux de Fonds, il n’y a pas de correspondance, je dois attendre le train longtemps et il fait froid…. quelqu’un pourrait venir me chercher ?
plus tard :
- allo ?
et encore plus tard :
- oups ! plus la peine de venir, je n’ai plus de batterie (on se raterait).

Un peu de froid ne fait pas de mal à une ado… mais derrière l’info, j’ai perçu dans cet appel une pointe de blues… et même si elle ne doit plus le recevoir, je lui envoie un SMS :
- j’arrive !

La voix de papa
C’est ainsi que je suis arrivé à la gare de la plus haute ville d’Europe. A cette heure du soir, il fait froid en effet, mais ce n’est pas qu’une question de température, l’ambiance de la gare est glaciale. Sur le quai, de futurs passagers désabusés attentent recroquevillés sur eux-mêmes le temps qui n’en finit plus de s’arrêter. J’ai beau regarder partout, je ne vois pas ma fille, alors j’appelle fort :
Séphora ! ! !
Les badauds se retournent, mais je m’en fous… je cherche ma fille !
Séphora ! ! !
Ma voix résonne maintenant dans le passage sous voie éclairé de pâles néons moribonds et brise le silence de la routine habituelle de cette heure.
Oh-oh Alain, Je vais juste chercher ma fille à la gare… pourquoi mon cœur s’emballe ainsi ? Et en même temps pourquoi vouloir tout comprendre plutôt que le vivre simplement ?
Réfléchis, Alain, tu la connais bien, où est-ce qu’elle peut bien être…?
Le MacDo, bien sûr ! Bingo ! c’est à travers les vitres de la porte du fast food en train de s’ouvrir que nos regards se croisent. Nous sursautons de joie, nous nous serrons sûrement trop fort dans les bras, car l’arrière de nos yeux retient avec peine notre trop plein d’émotion ainsi compressé… Dans le cocon de l’habitacle de la voiture, je suis avec ma grande fille. Les discussions sont animées, ponctuées de rires, le vieux ventilateur tourne à plein régime et remplace le lecteur radio obsolète, il fait bon chaud, le temps passe trop vite et le froid de la nuit d’automne à l’extérieur a beau être énorme, il n’existe plus.

Les bruits qui font peur
Quand il m’arrive – comme à tout à chacun – de traverser des bruits de vie tourmentée, glaciale et sans amour, je me rappelle alors combien fort j’aime mes enfants et je me dis :
- Dieu m’aime en ce moment encore plus que ça…!

Si ça vous arrive, faites comme moi, stoppez votre brouhaha intérieur s’accusant et se défendant tour à tour, tendez l’oreille et écoutez, alors sûrement que vous aussi vous entendrez cette voix tout près vous chuchotant :
- Voilà, c’est papa, je suis là, n’aie pas peur…

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