Valéry

Valéry est ma belle-soeur. Et elle possède une chose de plus que la plupart d’entre nous : un chromosome de plus.

Valéry est trisomique.

Elle nous rend visite une fois par an et cette visite, je l'appréhende toujours un peu. C'est comme un trajet en train où, normalement, j'arrête à la gare “Ma Vie”, pour finalement prendre un autre train, direction “Simplicité”. J'appréhende, et en même temps j'apprends beaucoup de choses sur moi-même.

Valéry mange lentement… ça dure une éternité, et ça met les nerfs à dure épreuve ; mais la nourriture, il faut bien la savourer n’est-ce pas… surtout quand il y a une glace à la fin du repas, suivie d'un bon café. Oh, combien de repas ai-je sautés à cause d’un emploi du temps trop chargé ? Je ne me rappelle plus la dernière fois où j'ai pris le temps de déguster une onctueuse crème brûlée. Sans parler des repas où nos discussions d’adultes soi-disant intelligents tournent autour des problèmes, qui nous stressent, alors que nous devrions prendre le temps de nous réjouir.

Valéry ne marche pas rapidement non plus ; ça prend une matinée entière pour ramasser les mûres (dans la perspective, bien entendu, d’une délicieuse tarte). Il faut aussi compter une après-midi complète pour visiter une petite ferme d’animaux. Le soir, nous mimons les sons de ces animaux et nous lui demandons de deviner de quel animal il s'agit ; un retour à notre propre jeunesse.

Elle aime colorier... Valéry peut passer des heures, crayon en main. En fait, moi aussi, mais je ne le fais jamais.

Ah, et la musique ! Je crois qu'elle même se retrouve quand elle écoute ses CD. Elle chante toutes les chansonnettes de son enfance et elle nous embarque très facilement à chanter avec elle. Elle se régale à l'église pendant la louange (la prédication est longue pour elle – et j'admets que parfois, pour moi aussi ; mais chut, c'est entre nous!)

Valéry a un sens du temps inné. Le thé de cinq heures est un vrai ‘must’. Elle prend ce temps de détente pas nécessairement comme une habitude mais comme une nécessité. Une pause, la tranquillité, le partage...

C'est toujours étonnant de l'entendre rire pour un rien, soudainement ; et comme c'est très contagieux, moi aussi je me mets à pouffer de rire !

Notre chien reste souvent aux pieds de Valéry, et elle le caresse tendrement durant ses activités de coloriage ; il n’attend que ça !

Jésus a dit que nous devions devenir comme de petits enfants, être simple et humble comme eux... ; je me demande s'Il avait en tête toutes les Valéry.

Quant à moi, je me demande, enfin, qui est le vrai handicapé ?

Love